Karine Rougier, Clara Rivault: Io et Jupiter

24 Juillet - 4 Septembre 2021

“Le monde de l’art n’est pas celui de l’immortalité, c’est celui de la métamorphose" 
— André Malraux (« Antimémoires », 1967)

A2Z Art Gallery est fière et heureuse de vous ouvrir les portes de « Io et Jupiter », un monde poétique et surréaliste pensé par les artistes françaises Karine Rougier et Clara Rivault. 

Réuni pour la première fois à Paris, le duo show féminin met en lumière des interrogations plastiques tournées autour des corps qui évoluent et se façonnent sous les contraintes et pressions du temps sacré et impalpable et des lois physiques de la gravité et de l’espace.

Comme le montre si bien le chef d’œuvre peint par Le Corrège ​​vers 1532–1533, Io et Jupiter sont deux corps : celui d’une femme et d’un homme, d’un être mortel et d’un Dieu, d’un corps de chair et d’une nuée transparente. Rapporté dans les “Métamorphoses” par le poète latin Ovide au Ier siècle de notre ère, le récit d’Io et Jupiter symbolise la rencontre érotique et charnelle entre les mondes divin et terrestre, entre le souffle et la matière. Poème en prose, théâtre de la transformation d’êtres vivants en objets, en animaux ou en végétaux, le mythe incarne une source d’inspiration inépuisable pour nombre d’artistes. 

Semblant accomplir des rites de transformation, des créatures costumées, mi-homme mi-animal paradent dans l’univers fantastique de Karine Rougier. Parallèlement, Clara Rivault vient façonner et métamorphoser la matière : l’acier, le bois et le verre sont habités d’un souffle de vie. Les deux artistes entrent en résonance avec les idées du philosophe français Michel Foucault qui pensait que « les métamorphoses ne traduisent que l’amour et la mort : elles font triompher la vie en faisant s’accoupler les êtres de toutes espèces ou elles trompent la mort en faisant passer les vivants d'une forme dans une autre ». 

Ces transformations se dessinent grâce à différents jeux de matière : support des gravures rehaussées de Karine Rougier, le bois est également source de création pour Clara Rivault. Le verre soufflé de Clara fait écho à la transparence, parfois magique, de certains éléments peints par Karine Rougier. Toutes deux jouent des contraintes de la matière : comment réagit un corps à une pression ? Là où la matière semble se tordre et s’étendre chez Clara, les êtres humains de Karine flottent debout sur des nuages.

Consciente du passage du temps, Karine Rougier revisite d’anciens rites en s’appuyant sur de vieux documents, livres et gravures ayant appartenu à sa famille. Interrogeant le rapport du Vivant par rapport à la forme, la matière et l’espace, Clara Rivault accouple des objets vieux de plus de 100 ans, des « ready-made » qu’elle considère habités d’une âme. Fortement marquée par la spiritualité japonaise, Clara pétrifie le bois par le feu grâce à la technique nippone du Shou Sugi Ban pour l’unir à un souffle cristallisé et fragile. Contraintes et unies, ses sculptures androgynes libèrent alors une tension en équilibre que seule la main de l’Homme peut briser.

C’est donc sur les notions de fragilité, d’équilibre et de tension que les deux artistes nous interrogent : qui sommes-nous, humains, au milieu des forces de l’Univers ?